Un pylône telecom annulé à Vert

Collectif de la sente des Près. A Vert, petit village de 821 habitants dans la vallée de la Vaucouleurs, la maire a lancé, il y a trois ans, en toute opacité, un projet d’implantation d’antennes sur un terrain communal. En janvier 2024, elle annonce à la population, dans le bulletin municipal, « une étude de faisabilité de deux antennes-relais sur le terrain de sport ». Aucun détail supplémentaire. Il est à noter que tout le processus, d’un bout à l’autre, sera entaché d’irrégularités plus ou moins importantes.

Début juin 2024, sans avertissement, nous découvrons par le biais de conversations avec des ouvriers venus sonder le terrain que le projet est imminent.

L’implantation de deux antennes 5G, SFR et Bouygues, d’une hauteur de 33 m, est prévue sur le terrain de foot, en plein cœur du village, en bordure de rivière, dans un lieu bucolique et très fréquenté, à 80m des premières habitations et 200 mètres de l’école.

Aucune information, pourtant obligatoire, de la population (un adjoint aura ce mot historique : « Si on vous avait prévenus, vous n’auriez pas été d’accord »).

Il nous faudra deux mois, plusieurs demandes, mails et courrier recommandé pour obtenir un rendez-vous avec la maire.

Lors de ce rendez-vous enfin obtenu, début août, nous apprenons que le projet SFR est tombé à l’eau (terrain non approprié) et que le projet Bouygues serait toujours en étude de faisabilité. La maire élude, louvoie, promet une réunion publique avec l’opérateur à la fin de l’été.

Puis, coup de tonnerre, le 13 septembre, nous découvrons sur le terrain de foot un panneau d’affichage portant Arrêté de non opposition à une déclaration préalable de travaux pour l’implantation de l’antenne Bouygues Telecom, Arrêté daté du 4 mai 2024. Vous avez bien lu : 4 mai, ce qui veut dire que le projet était autorisé depuis 3 mois quand la maire, début août, nous parlait encore d’étude de faisabilité !

Nous constituons alors un collectif guidé par 3 objectifs : alerter la population, qui ne sait rien (lettre d’information, tracts, formulaire de pétition). Obtenir la réunion publique d’information avec l’opérateur. Sensibiliser la presse à notre cause.

La réunion publique a finalement lieu le 24 octobre 2024. Houleuse, avec un public nombreux, mais sans résultat. Un article est publié dans le Courrier de Mantes, puis un reportage sur BFM TV Ile de France. Mais la maire ne cède toujours rien.

Avec le soutien des associations JADE, Sauvons les Yvelines et Sauvons la Tournelle, nous passons à l’action juridique : dépôt d’un recours gracieux en mairie, épluchage minutieux des documents officiels (PLUi, PPRI, jurisprudence et législation), envoi d’un courrier au Préfet, dépôt de dossiers auprès de nos assurances responsabilité civile dans l’optique d’un recours  contentieux auprès de Tribunal Administratif, consultation d’un avocat (qui se montre peu optimiste sur nos chances de succès, tant les textes législatifs ont restreint les droits des citoyens).

Sans délaisser l’action de terrain : en plus des tracts et de la pétition (une centaine de signatures dans un premier temps), affichages de panneaux et de banderoles géantes et très voyantes dans le village, soutien d’une habitante, pédiatre à l’hôpital Robert Debré, qui alerte la maire par une lettre solidement documentée sur les dangers que les ondes électromagnétiques peuvent faire courir aux enfants, conversations téléphoniques avec la direction de Bouygues pour les convaincre de notre mobilisation, recueil d’attestations auprès d’agences immobilières sur la dévaluation des biens induite par la proximité d’antennes, motivation des 3 conseillers municipaux hostiles au projet pour tenter de persuader le Conseil, et surtout… pendant plusieurs week-ends, porte-à-porte pour présenter individuellement et faire signer la pétition que nous avions déjà distribuée à la population (gros travail mais aussi gros succès ! Environ 95% des personnes rencontrées signent).

Toutes ces actions ont fini par porter leurs fruits : bien que toujours sans débat public, le conseil municipal revient sur sa position le 16 décembre dernier, décision confirmée par une délibération le 13 janvier 2025.

Vraisemblablement, le succès inattendu de la pétition (225 signatures pour environ 400 foyers) a pesé dans la balance. Côté conseillers, ils n’avaient pas forcément pris conscience des conséquences du projet, notamment le risque de dévalorisation des biens immobiliers et l’impact visuel et environnemental. Nos informations les ont éclairés.

Comme l’a dit l’un d’entre eux : « Il faut se mettre à leur [les habitants] place, si on me mettait ça au fond de mon jardin, je ne serais pas d’accord. »

Dans cette histoire, tout le monde nous donnait perdants. Nous avions deux adversaires à retourner : la mairie et l’opérateur. Ça faisait beaucoup ! Mais comme l’a dit Bertold Brecht : « Celui qui ne se bat pas a déjà perdu. Celui qui se bat court le risque de gagner ! »

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